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Le blog de Patrick Allemand
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6 novembre 2007

Pour une assemblée constituante européenne

Vous le savez il y a deux ans et demi, j'ai voté oui au référendum sur le traité constitutionnel, Michel Vauzelle avait voté non. Notre président de Région vient d'écrire une tribune qu'il a intitulé "Pour une assemblée constituante européenne" J'ai souhaité la porter à votre connaissance et j'attends vos commentaires.

Deux ans et demi après le non du peuple français au traité constitutionnel, notre pays est à nouveau confronté à la question européenne, avec deux débats. Le premier porte sur la procédure : faut-il organiser un référendum ou peut-on se contenter d’un vote du parlement ? Le second porte sur le traité lui-même : les différences avec le projet de Traité constitutionnel sont elles suffisantes pour modifier le vote des partisans du non ?

La première question est tranchée pour nous, socialistes, depuis la campagne présidentielle. Avec notre candidate, nous avons décidé de soumettre au peuple tout nouveau traité européen. Revenir sur cette exigence ne contribuerait pas à nous rendre crédibles vis-à-vis de nos concitoyens.

Sur le fond du traité, notre réponse devrait être « oui », parce que ce nouveau traité n’a plus de portée « constitutionnelle ». C’est évidemment essentiel. Certes certains éléments restent contestables comme la référence à la « concurrence libre et non faussée », maintenue dans un protocole, et des éléments de politique économique, sociale, fiscale et monétaire. Une constitution européenne eut été un texte fondamental supérieur à notre propre constitution.

Je ne voterai donc pas contre ce traité comme j’avais voté « non » avec la majorité des Français.

Cependant si ces deux questions sont importantes, elles n’apportent pas pour autant de réponse à la crise de l’Europe. Ce nouveau traité, dit « simplifié », ratifié par le Parlement ne remettra pas, on peut le craindre, l’Europe en marche.

L’Europe s’est construite selon la stratégie des «petits pas ». Elle a permis de sortir de l’âge des guerres pour entrer dans l’ère de la paix et de la prospérité. Les fédéralistes et les confédéralistes, les atlantistes et les européistes ont pu jusqu’à présent faire route commune. L’idée européenne s’est imposée. Une très large majorité de nos responsables politiques est à juste titre convaincue qu’elle est notre avenir. Pourtant, l’Europe est en crise.

La stratégie des « petits pas » n’est plus adaptée. Il faut maintenant ouvrir un débat sur l’Europe que nous voulons avec les citoyens eux-mêmes pour qu’ils s’approprient enfin cette construction vitale pour eux et pour le monde. Pour cela, nous ne devons pas craindre le débat démocratique. Nous devons accepter la confrontation entre pro-européens de bords politiques différents, tout en nous reconnaissant mutuellement avec respect comme européens, sans caricaturer nos points de vue comme au moment du référendum. Quand notre peuple a dit « non » au projet « constitutionnel », ce n’était évidemment pas un « non » à l’Europe. C’était un « non » à un modèle de société qui niait les fondements de notre République. C’était un « non » à l’interdiction annoncée des débats sur les futures politiques économiques et sociales de l’Union. C’était un « non » pour que s’ouvre enfin une vraie discussion sur nos conceptions de l’Europe. Le peuple européen doit avoir le droit, comme le peuple français en 1789, de s’approprier la construction de l’Union et d’une vraie démocratie.

C’est bien là que réside la crise européenne, dans le fossé qui sépare depuis le début ceux qui la construisent et ceux qui la vivent. Les taux de participation aux élections des eurodéputés sont éloquents. Il ne suffit pas d’instaurer une citoyenneté européenne, décrétée d’en haut, pour qu’elle soit effectivement vécue par l’Europe d’en bas.

Cette Europe, construite par amendements de traités, dans un langage seulement accessible aux experts qui les écrivent, n’est pas celle des citoyens. Elle peut même les inquiéter malgré ses bienfaits.

La crise est une crise de confiance, due à la fracture citoyenne, entre le peuple et les décideurs. Le nouveau traité n’a de simplifié que le nom. Il comporte près de 300 amendements qui réécrivent les traités de Rome et de Maastricht. Comme le dit M. Giscard d’Estaing on continue à produire des textes « illisibles pour les citoyens ». On va donc faire voter le parlement le plus vite possible sans déranger un peuple occupé par la recherche d’un emploi, d’un logement, et son pouvoir d’achat. On cache à ce peuple que l’emploi, le logement et le pouvoir d’achat sont liés à ce que sera ou à ce que ne sera pas l’Europe.

Nous devons avoir une autre ambition pour l’Europe et ne pas renoncer à une vraie constitution. Une « vraie » constitution ne dicte pas à un peuple des choix définitifs en matière de politique économique et sociale. Elle fonde un vivre ensemble autour de valeurs et d’institutions communes.

Or, justement, dans un an et demi, nous allons élire nos nouveaux députés européens. Pourquoi ne pas décider que cette assemblée sera constituante ? Pourquoi ne pas utiliser le temps qui nous sépare de 2009 à organiser des Etats Généraux de l’Europe ? Ainsi, tous les citoyens européens seraient appelés à rédiger des « cahiers de doléance », syndicats, associations, élus locaux. Chacun y inscrirait ce qu’il attend de l’Europe. Des forums citoyens dans chaque pays mais aussi transfrontaliers, transnationaux seraient organisés pour discuter des enjeux culturels et donner enfin la parole aux peuples d’Europe.

Imaginons les citoyens européens allant aux urnes le même jour, au terme de cette année de vie démocratique européenne, pour élire une assemblée constituante qui porte réellement et directement pour la première fois leurs volontés et leurs espérances.

Les partisans du « non » ont été traités lors de la campagne référendaire par la quasi-totalité des détenteurs du pouvoir avec une agressivité souvent injurieuse. On ne peut oublier que par son choix, c’est le peuple français lui-même qui a été injurié. Il faut tourner cette page pour écrire, cette fois pour l’Europe, ce que le peuple français a écrit pour la France en 1789.

A la fin de l’année 2009, nous aurons un traité simplifié, ratifié par les « 27 » sans résoudre la crise démocratique. Nous pouvons faire un autre choix, celui d’une constitution, élaborée enfin par le peuple lui-même. Les détenteurs du pouvoir ne devraient pas avoir peur du peuple. Ils devraient libérer l’avenir en remettant enfin celui de l’Europe entre les mains de ses citoyens.

Le parlement va voter, pas le peuple. Comme le peuple, je m’abstiendrai.

Michel VAUZELLE

Ancien Ministre

Député-Président de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur

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Commentaires
R
Il est lamentable que le peuple ne soit pas consulté sur une question aussi importante. Après il ne faudra pas venir pleurer en constatant que le fossé entre les Français, les politiques et l'Europe devient de plus en plus large et profond.
G
Oui cette europe telle que Michel vauzelle l'appelle de ses voeux, ce serait un grand espoir. J'ai personnellement voté oui au référendum mais je suis hostile à la ratification par le Congrès. J'avais beaucoup aimé ce qu'avait dit Ségolène Royal pendant la campagne. Ce que le peuple fait, seul le peuple peut le défaire. Sarkozy méprise le puple en confiant cette affaire sérieuse à la démocratie représentative. Je suis vraiment déçu.
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