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Le blog de Patrick Allemand
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25 avril 2007

Il est 12h45....

jfk

Il est 12h45 et je viens d'effacer de la mémoire de mon portable un numéro que je ne composerai jamais plus...celui de Jean François Knecht...celui la même où mercredi 18 avril, quand la rumeur commençait à se répandre, vers 18h30 j'ai du laisser un dernier message très laconique, tant c'était délicat,  "jean françois, c'est patrick, peux tu me rappeler s'il te plait pour me rassurer" tant cela me paraissait invraisemblable.

Hier à la cathédrale Sainte Réparate, l'émotion était forte et le désarroi unanime.

Voici le texte lu par Patrick Mottard :

"Rendre hommage à Jean-François, c’est d’abord rendre hommage au personnage public. Celui qui manque déjà au petit peuple de Nice, ces Niçois de toutes origines qui s’expriment si nombreux depuis mercredi.

Ces femmes et ces hommes, souvent modestes, ne se trompent pas : oui, Jean-François était un des leurs.

Cet élu les représentait en leur ressemblant.

Cet élu avait compris que lorsqu’on ne vit pas comme on pense, on finit par penser comme on vit.

Cet élu n’était pas un notable.

D’ailleurs, comment imaginer un notable capable de construire sa maison de ses propres mains ? De partir discrètement, sans rien dire à personne, en mission humanitaire en Afrique ? De sillonner la ville avec son scooter rouge pour aller au-devant de ceux qui lui demandaient un conseil ou de l’aide en embarquant parfois son Président de groupe sur le porte-bagages ?

Mais son action, chacun le sait, allait bien au-delà de ce travail de proximité auquel il tenait tant.

Sa passion dévorante pour l’intérêt général, pour la chose publique, le conduisait à prendre à bras le corps les grands dossiers de notre cité et de notre département. Dans ces cas-là, je peux en témoigner, malgré sa silhouette dégingandée et son élégance approximative, il n’avait rien d’un Don Quichotte : ses moulins à lui étaient bien réels.

Aucune volonté de se mettre sous les feux de la rampe, aucune volonté de tirer la couverture à lui - ses compagnons de Nice Plurielle peuvent en témoigner -, mais l’ardente obligation de lutter contre les mauvaises décisions, les irrégularités, les malversations... Et cela, au nom de ces valeurs républicaines si chères à la fois au militant socialiste, au père de famille, et à l’officier de réserve.

Pour autant, cet opposant farouche n’était ni un destructeur, ni un prédateur : il possédait aussi une remarquable force de propositions. Et l’on se prend à rêver du magnifique élu majoritaire et bâtisseur qu’il aurait pu être si...

Mais diront les cyniques : pourquoi cette recherche perpétuelle de l’inaccessible étoile ? C’est qu’en fait, Jean-François avait une conviction chevillée au corps, une conviction si forte, si essentielle, qu’elle lui donnait une dimension bien supérieure à celle de l’activiste généreux à laquelle on a trop souvent voulu le réduire : pour lui, les institutions et les systèmes étaient perfectibles, et cette perfectibilité même était la métaphore parfaite de la perfectibilité de l’homme.

Oui, Jean-François croyait en la perfectibilité de l’homme. C’était à la fois sa force et sa faiblesse.

Cet humanisme, ceux qui, comme moi, ont eu la chance de partager un peu de son intimité, ont pu comprendre qu’il était à la fois ce qui l’éclairait et le guidait, tout en étant la cause de quelques fêlures intérieures. Ces lézardes de l’âme qui font de l’homme, et singulièrement de l’homme politique, autre chose qu’un mutant ou une machine.

C’est que Jean-François était perpétuellement en recherche d’amour. Il aimait les autres beaucoup, passionnément, parfois irraisonnablement... A l’inverse, ne pas être aimé le désemparait.

Pourtant, plus son action publique dérangeait, plus le risque de désamour, des petites trahisons ou même de haine était grand. Ce qu’on pouvait considérer froidement comme la conséquence limitée mais logique de son activité, Jean-François ne l’a jamais accepté et le vivait comme une injustice profonde puisqu’il agissait pour le bien de tous. Il le vivait d’autant plus mal que lui-même, en privé - et je peux en témoigner -, n’a jamais été désobligeant, n’a jamais manqué de respect, même pour ses adversaires les plus redoutables.

Face à ce désamour, il aurait pu faire siens ces propos d’Albert Cohen : « Que cette épouvantable aventure des humains qui arrivent, rient, bougent puis soudain ne bougent plus, que cette catastrophe qui les attend ne nous rendent pas tendres et pitoyables les uns pour les autres, cela est incroyable ».

Tout à l’heure, les portes de la cathédrale s’ouvriront à nouveau sur le forum et le temps recommencera à passer... Mais n’oublions pas que pendant quelques minutes, nous avons été tendres et pitoyables les uns pour les autres. Pour ce juste.

Jean-François, le moment de l’Adieu est venu.

J’aimerais le faire avec ces trois mots de tendresse retenue, ces trois mots que tu prononçais en regardant l’autre avec bienveillance mais la voix parcourue d’une étrange inquiétude chuchotée,
Jean-François,
Où que tu sois,
Là-haut, là-bas, de l’autre côté,
Jean-François,
« Porte-toi bien ».

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Commentaires
D
Cela fait déja neufs jours que nous l'avons enterré. Comme le temps passe vite. En politique encore plus, les vautours tournent déja autour de son canton.
M
J uriste, E nergisant, A udacieux, N erveux. <br /> F onceur, R êveur, A nxieux, N aturel, C harmeur, O pposant, I nvestigateur, S érieux.<br /> Jean-François était tout à la fois. <br /> MERCI pour tout! <br /> Martine B. , Mélanie et Marlène
V
C'est bien le mot Patrick.<br /> Comme toi, l'incrédulité d'abord, la stupeur ensuite. Jean-François tu aimais surprendre. Là tu y es allé fort, trop fort. "Vous ne me reconnaissez pas à ma juste valeur ! Je m'en vais". On pensait qu'il disait ça comme un ado qui a besoin qu'on lui dise qu'on l'aime et souvent on le lui disait, chacun à sa manière. Il nous a tout de même lâchés. On ne peut pas se mettre en colère contre toi, tu n'es plus là pour en rigoler.<br /> Tu voulais montrer l'exemple ? Tu n'a cessé de le faire. Tu a mis la barre très haute. Il va falloir suivre...pas facile. Non vraiment tu ne nous a pas fait de cadeau en partant. Mais merci d'avoir été ce que tu étais homme et élu confondus. Je suis fière de t'avoir connu.<br /> Véronique
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