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Le blog de Patrick Allemand
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26 décembre 2008

Grand Stade : Pourquoi le choix d'estrosi est contraire au bon sens!

Délibération sur le Grand Stade

Monsieur le maire, mes chers collègues,

Lors de la campagne municipale, la liste « Changer d'ère » avait promis pour 2010 un stade entièrement neuf de 26.000 places reconstruit au Ray.

Nous pensions que ce projet répondait à la fois à la situation financière de la ville, parce que contrairement à vous nous l'avions pris en compte avant de rédiger notre projet, et aux besoins du club et de ses supporters.

Sur l'aspect financier d'abord, Il y a pour l'heure peu d'indications concernant le coût d'un réaménagement tribune par tribune au Ray, cette solution ayant été écartée avant même d'avoir été réellement envisagée. Mais ce qui s'est passé à Rennes notamment apporte un éclairage intéressant sur une telle issue. Après 5 ans de travaux, la capacité du Parc des sports de la Route de Lorient a été portée à plus de 31 000 places, sans pour autant qu'un seul match ait dû être joué ailleurs et que l'équipe soit rétrogradée. Il est situé à proximité du centre-ville de Rennes. De 24 000 places assises, il est devenu, avec la fin des travaux, une arène fermée de 31 000 places, toutes numérotées. La restructuration et l'extension de ce stade a coûté 37,3 millions d'euros. Compte tenu du coût de la construction dans les AM, il est raisonnable d'estimer le coût d'une reconstruction du Ray tribune par tribune à une somme d'environ 60 millions d'euros sur la base de 26 000 de capacité à 2 300 euros la place, soit une économie de 40 millions d'euros par rapport à votre projet.

Et 40 millions c'est un minimum car le partenariat public-privé que vous avez choisi comme mode de financement risque de coût au final plus cher aux contribuables niçois. En Grande-Bretagne un certain nombre d'équipements publics financés selon des modalités comparables ont coûté beaucoup plus cher que prévu, tout simplement parce que dans un contrat dont l'exécution s'étale sur plusieurs décennies il y a toujours une part notable d'incertitudes et que ces incertitudes pèsent sur le contribuable comme une épée de Damoclés. Regardez la brillante démonstration à laquelle s'est livrée Paul Cuturello à propos du commissariat des Moulins. Il coutera au final plus du double du cout de sa construction :39 millions d'euros au lieu de 17.

Mais la question centrale de ce débat est la suivante : est-ce que oui ou non, le football professionnel est en mesure de déplacer au moins 30.000 personnes chaque semaine ? Si on pense que oui, il est indispensable de réaliser un stade à St-Isidore même si les coûts apparaissent élevés, tout simplement parce que l'emprise foncière au Ray ne le supporterait pas. Mais cela ne résiste pas à une analyse sur le long terme.

En 60 ans, l'affluence moyenne n'a dépassé 10 000 spectateurs qu'à 22 reprises. Seulement 8 fois durant les 30 dernières années. La moyenne la plus élevée date de la saison 1951-1952 : 15 223 spectateurs de moyenne. Même dans les années 70, alors que l'OGC Nice faisait partie des 3 ou 4 meilleurs clubs français, la moyenne oscillait entre 12 et 14 000. L'année 2003, celle de la remontée, a été exceptionnelle : 13 488 spectateurs de moyenne après 5 saisons en D2 et 12 journées de championnat en tête de la Ligue1. L'an dernier, même le derby contre l'Olympique de Marseille ou la réception du champion de France, ne se sont pas joués à guichets fermés dans un stade de 17 500 places.

Les études menées par la Ligue Nationale de Football montrent que dans les stades neufs, les affluences augmentent généralement de 30%.

Si l'on applique ce ratio à notre meilleure moyenne depuis 30 ans, 13 488, on arrive à une moyenne de 17 532. Quel sera l'apport pour l'équipe d'un stade rempli à 50% dans le meilleur des cas. Veut-on faire un deuxième stade Louis II ?

La volonté de faire un stade de 40 000 places est donc en décalage. Il permettrait d'accueillir des matchs internationaux, mais doit-on investir dans un si grand stade pour une compétition internationale, l'Euro 2016, que la France n'est pas assurée d'organiser et alors même que Nice n'a été retenue dans les villes candidates qu'au dernier moment, un peu pour vous faire plaisir, mais visiblement sans grande conviction. Tout simplement parce que, bénéficiant des investissement réalisé par le mondial 1998, notre pays remplit déjà le cahier des charges imposé par l'UEFA.

Cette capacité de 40.000 places nous semble d'autant plus en décalage qu'on prévoit de construire le stade à la périphérie de la ville. Or l'expérience montre que dans l'arc latin, les grands stades en dehors de la ville sont des échecs.

Dans le Nord de l'Europe et dans le Nord de la France, les grands stades modernes sont de plus en plus construits en banlieue des villes et les exemples de réussite sont nombreux.

En Espagne et en Italie, au sud de Lyon, les stades sont dans les villes : Santiago Bernabeu à Madrid, la Mestalla à Valence, le Camp Nou à Barcelone, le Luigi Ferraris à Gènes, le Vélodrome à Marseille etc... Et les tentatives de délocalisation des stades dans nos régions méditerranéennes ont de quoi nous préoccuper.

En 1992, au moment des choix des stades et des villes d'accueil de la coupe du Monde, Bernard Tapie au faite de sa gloire sportive avait évoqué la possibilité de quitter le Stade Vélodrome et de construire un grand stade en dehors de Marseille. La levée de bouclier a été telle que cette hypothèse a été abandonnée et que le stade a été réaménagé sur place.

Plus récemment, la Juventus de Turin a quitté le Stadio communale pour se faire construire un stade en dehors de la ville, le stade Delli Alpi. 
La Juve a perdu 25 000 spectateurs de moyenne et tente aujourd'hui de racheter son ancien stade pour retourner jouer en ville.

Enfin deux exemples plus proches de nous apparaissent encore plus alarmants :

Le cas de l'A.S. Cannes, qui a quitté les Hespérides pour le stade Coubertin dont tous les cannois considèrent qu'ils n'ont jamais retrouvé à Coubertin l'âme des Hespérides. L'A.S. Cannes est aujourd'hui un club qui n'en finit pas de mourir.

L'Olympique de Nîmes, les célèbres « crocodiles » qui faisaient trembler tant d'équipes dans leur vieux stade Jean Bouin en ville et qui ont bâti un magnifique stade en dehors de la ville, les Costières. Le club n'a pas survécu à cette mutation.

On peut déduire de ce constat que dans le Sud, les stades en dehors de la ville ça ne marche pas car dans les régions latines, le stade, c'est l'agora, on converge vers le stade. Et on y converge d'autant mieux que l'on a désormais le tramway et que rien n'empêche de construire un grand parking sur plusieurs niveaux.

Pour nous, un stade de 26.000 places au cœur de la ville, c'était donc la bonne équation.

Mais comme d'habitude, vous vous êtes cru obligé de faire de la surenchère : « Nous aurons un grand stade de 40.000 places dans la Plaine du Var qui pourra accueillir l'EURO. Ce Grand Stade sera réalisé dans les deux ans et demi (c'est à dire en 2010). Je m'y engage. » aviez-vous déclaré le 10 février 2008.

Le temps des promesses de campagne démagogiques est passé. Désormais nous entrons dans la phase de vérité. Vous venez de différer de 3 ans la livraison du nouveau stade que nous attendons depuis 20 ans. Elle n'intervidra qu'en 2013.

J'espère qu'elle n'arrivera pas trop tard pour l'OGC Nice car avec de telles infrastructures maintenir le club en Ligue 1 pendant encore 5 ans relèvera du miracle.

Quant aux supporters, ils viennent de se rendre compte à quel point ils ont été bernés. Car le résumé est simple : en 2006, un préfet aux ordres du Ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy obtenait du tribunal administratif l'annulation d'un projet qui devait être achevé fin 2007, pour un motif futile (l'absence de prévision sur le prix des places).

Au final, vous êtes en train de nous préparer le même stade, au même endroit, avec le même montage financier mais 6 ans plus tard. 6 ans de perdus sur le dos des supporters et du club pour des raisons politiciennes internes à l'UMP.

Pour toutes ces raisons, Monsieur le maire, nous nous abstiendrons sur cette cette délibération.

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Commentaires
P
Bravo Patrick,<br /> <br /> Ton intervention est excellente, parfaitement claire et documentée, et démontre s'il en était encore besoin que la politique bling-bling a aussi frappé à Nice.<br /> <br /> Seul bémol:<br /> L'AS Cannes n'est pas en train de mourir, mais est un club bien portant, même si son équipe Une connait depuis 8 ans des difficultés, dues pour l'essentiel à la gestion bling bling (déjà) de la municipalité de l'époque.<br /> <br /> Bonne année à tous
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